Semaine cruciale pour la réforme des retraites. Alors que les débats au Sénat se poursuivent avec le vote hier d’un “CDI Senioren”, les opposants au projet phare d’Emmanuel Macron, massivement soutenus par les Français, veulent “fermer la France” ce mardi ou, pour certains, même au-delà.
Près de deux mois après qu’Elisabeth Borne a présenté le 10 janvier la réforme des retraites, le combat pour les retraites entre désormais dans une nouvelle phase. Les opposants au projet gouvernemental veulent faire de cette sixième journée d’action l’appel le plus important et le plus radical avec la France “à l’arrêt”. L’Intersyndicale, toujours solide et en front uni pour la première fois depuis 12 ans, ambitionne de faire mieux qu’au 31 janvier, quand la police comptait 1,27 million de participants et l’Intersyndicale plus de 2,5 millions dans les rues de France. La CGT a recensé 265 rassemblements à travers la France pour ce mardi et la police a estimé entre 1,1 et 1,4 million de manifestants hier, dont 60 à 90 000 à Paris. Des manifestations aussi massives que de soutien aux Français.
Selon un sondage Elabe publié hier, le soutien à la mobilisation contre la réforme des retraites reste très élevé malgré une légère baisse (64%, -3) et le shutdown du pays (59%) et la grève reconductible (56%) sont contre la réforme, sont massivement soutenus par une opinion toujours opposée au projet du gouvernement (67%), qu’il juge injuste (69%), inefficace pour assurer la pérennité du système (57%) et inutile (51%)…
Les raffineries en première ligne
“J’appelle les salariés de ce pays, les citoyens, les retraités, à venir manifester massivement”, a déclaré hier le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, appelant Emmanuel Macron à répondre enfin à l’ampleur de la mobilisation. . “Le président de la République ne doit pas rester sourd”, a déclaré le dirigeant syndical, figure clé du conflit social.
Cette journée de manifestations et de grèves risque de toucher de nombreux secteurs. De très fortes perturbations sont prévues dans les transports urbains et ferroviaires, et tous les syndicats ont appelé à une grève reconductible à la RATP et à la SNCF à partir de ce mardi. Dans le secteur de l’énergie, les syndicats ont orchestré des réductions de production dans plusieurs centrales nucléaires ; la CGT promet “une semaine noire”. *
Côté carburant, la CGT a également appelé à une grève reconductible dans les raffineries dans le but de “verrouiller toute l’économie”. Les syndicats d’enseignants ont réclamé “la fermeture complète des écoles, collèges, lycées”. Le Snuipp-FSU, premier syndicat des écoles primaires, prédit que “plus de 60%” des enseignants du primaire se mettront en grève et que “plusieurs milliers d’écoles” fermeront. Des blocages de la part des lycéens sont également à prévoir, même si la mobilisation dans la jeunesse peine à prendre pied.
Réforme des retraites : les syndicats mettent la France en attente, et après ?
Au vu de ces blocages et de leur éventuelle extension, le gouvernement peine à trouver une solution. Après qu’un porte-parole du gouvernement Olivier Véran ait déclaré que “la France à l’arrêt” signifierait une “catastrophe écologique, agricole, sanitaire voire humaine” (sic), le gouvernement est revenu à des propos moins grotesques et a exhorté hier les opposants à la réforme de la “responsabilité”.
Le Sénat fait la réforme à sa main
Plus encore que la mobilisation d’aujourd’hui et ses conséquences – pleines d’inconnues – le gouvernement observe ce qui se passe au Sénat, où la réforme des retraites est examinée depuis jeudi dernier et fortement modifiée sous l’impulsion des sénateurs LR. Alors que le président LR Eric Ciotti a pactisé avec Elisabeth Borne pour soutenir la réforme, le chef des sénateurs LR Bruno Retailleau pousse ses pions et ses changements qui menacent le gouvernement.
Dans la nuit de dimanche à lundi, le Sénat a réintroduit l’indice des seniors, qui était contesté par l’Assemblée nationale, mais uniquement pour les entreprises de plus de 300 salariés. Contre l’avis du gouvernement, qui craint “un effet d’aubaine”, la majorité de droite a voté hier un amendement législatif qui créerait un nouveau type de CDI de “fin de carrière” pour favoriser l’embauche des travailleurs âgés de 60 ans et plus. Années. Avec ce « CDI Senioren », l’employeur serait exonéré des cotisations familiales ; une mesure estimée par l’exécutif à hauteur de 2,2 milliards d’euros…
Au final, le coût des concessions gouvernementales pour rallier le vote des LR pèse sur les économies attendues d’une réforme qui devient de jour en jour moins lisible…