3 films que vos parents vous ont montrés ?
J’ai eu la chance d’avoir des parents hyper cinéphiles, qui avaient quand même une haute idée de la culture. J’ai grandi à Saint-Denis, au début des années 1980. Autant vous dire qu’ils me traînaient dans des tas de festivals de films de l’Est, communisme oblige. Des films hongrois, roumains…
Au centre culturel Jean-Houdremont, à la Courneuve, ma mère me lisait les sous-titres à voix haute parce que j’avais 5 ans… Ce n’est pas tant les films que l’esthétique Europe de l’Est des années 1970-1980 qui m’a marqué. Je crois que j’ai compris à ce moment-là que le cinéma allait changer ma vie.
Bref, à 7 ans, ma mère m’amène quand même voir un film américain : Les Raisins de la colère de John Ford. Ça m’a tué. C’était pas du tout le genre de trucs sérieux que j’avais envie de voir au cinéma. Pour faire chier mes parents, j’ai amené mon père voir A la poursuite du diamant vert de Robert Zemeckis, beaucoup plus commercial. Il fait un infarctus ! En même temps, c’était tellement misogyne, toute cette thune, cette sur virilité… Moi je voulais juste voir de l’aventure. Après, ce tropisme pour l’Europe de l’Est m’a permis de résister à l’hégémonie des films américains.
Il faut quand même que je trouve un film qu’ils m’ont montré et que j’ai aimé. Parce que déjà que depuis L’Origine du mal, ils veulent me déshériter… Ah ça y est, j’ai trouvé. Mes parents étaient allés à voir Requiem pour un massacre d’Elem Klimov. Ils sont rentrés à la maison dans un état… Ma mère était pâle, avait fait un malaise… C’est devenu le film culte que je n’avais pas vu. Quand je l’ai découvert à 25 ans, je les ai appelés pour le dire : « C’est génial ! »
Dernier souvenir pour la route : Indiana Jones et le Temple maudit de Steven Spielberg avec ma grand-mère. Elle terrifiée, moi mort de rire. J’avais quand même une famille complètement tarée, parce que je me souviens de cette scène où ils sont dans le noir dans un tunnel, et un gamin dit : « On dirait qu’on marche sur des biscuits apéritifs. » Alors que c’était des bouts de verre et des cafards ! Après ça, à chaque Noël, ma grand-mère venait vers moi et cassait des Tucs dans mon oreille pour imiter le bruit. Bon là avec India Jones et Requiem, on a une opposition bloc de l’Est/bloc de l’Ouest parfaite, et Les Raisins de la colère au milieu. Ce mélange a foutu un petit bordel dans ma tête à l’époque.