“Makanai”, la série de Kore-eda sur Netflix manque cruellement de saveur

Hirokazu Kore-eda revient à la série avec l’adaptation d’un manga culinaire. Une série qui fait la part belle à l’esprit sororal de l’histoire mais qui reste à la surface.

Au départ, il y avait un manga (titré La Maison des Makanai dans son édition française chez Noeve) publié au Japon depuis 2016 et créé par Aiko Koyama. Une plongée dans le monde des geishas contemporaines, au cœur du quartier de Gion à Kyoto, où leur existence se maintient encore après avoir chuté drastiquement partout ailleurs dans le pays.

Pour son retour à la série, onze ans après Going My Home, Hirokazu Kore-eda (cinéaste récompensé à Cannes pour Une affaire de famille en 2018) s’intéresse donc à un monde juste à côté du monde, une petite communauté humaine où de jeunes femmes apprennent ce qui deviendra leur métier : pratiquer les arts, et tenir compagnie à des hommes.

Deux maiko (apprenties geishas) quittent leur famille à l’âge de seize ans pour commencer leur formation et arrivent dans cette ville qu’elles ne connaissaient pas. Elles s’appellent Kiyo (Nana Mori) et Sumire (Natsuki Deguchi), sont les meilleures amies du monde depuis l’enfance, et ont juré de ne jamais se séparer. Sauf que la première, après quelques jours, est jugée inapte à devenir plus tard une geisha. Panique. Par un glissement bienvenu du récit, elle s’impose en tant que cuisinière pour le groupe (makanai), ce qui lui permet de continuer à vivre avec son amie ainsi que les femmes qui l’entourent. Ses plats rendent le yakata (leur pension) plus doux et convivial. À travers elle, la série rend hommage à la cuisine populaire japonaise avec une sincérité évidente, des currys de tomate à une somptueuse omelette au poulet Oyakodon.

De la délicatesse à la fadeur

Kore-eda, qui a réalisé six des neuf épisodes, excelle dans l’art de recueillir paisiblement des gestes, montrant de façon assez subtile comment l’incompétence de Kiyo dans sa formation se transforme en finesse devant les fourneaux. Les mêmes mains et le même corps acquièrent sous nos yeux une compétence (la cuisine) alors qu’ils étaient destinés à autre chose, et c’est d’abord ce que l’on retient de Makanai : dans la cuisine des maiko, de plusieurs façons. Alors que le cliché associé aux geishas, dans l’imaginaire occidental, les situe parfois aux confins de la prostitution, la série cherche d’abord de quoi elles sont capables (non pas au service des hommes, mais pour elles-mêmes). Ici, la sororité n’est pas un projet, mais une réalité qui infuse chaque scène. La famille que se crée les deux héroïnes est d’abord féminine.

Le souci, puisque souci il y a, tient à la relative mollesse de l’ensemble. De la délicatesse à la fadeur, il n’y a qu’un pas, et cette fadeur n’est sans doute pas assez travaillée ou habitée pour emporter le morceau. Makanai : dans la cuisine des maiko se contente souvent de touches impressionnistes qui manquent de profondeur, comme si la relative violence des films de Kore-eda (toujours mêlée à une sensibilité qui touche parfois à la mièvrerie) se diluait dans ce projet qui cherche avant tout la lumière et la légèreté. On n’en sort pas indifférent, mais quelque chose manque pour que les enjeux puissants, à l’œuvre ici, parviennent réellement jusqu’à nous. Si on voulait être méchant, on dirait que l’on attend le livre de recettes avec impatience et qu’il nous aurait suffi. On n’est pas si loin de le penser.

Makanai : dans la cuisine des maiko de Hirokazu Kore-eda avec Nana Mori, Deguchi Natsuki, Aju Makita. Sur Netflix

“Makanai”, la série de Kore-eda sur Netflix manque cruellement de saveur

“Makanai”, la série de Kore-eda sur Netflix manque cruellement de saveur

Hirokazu Kore-eda revient à la série avec l’adaptation d’un manga culinaire. Une série qui fait la part belle à l’esprit sororal de l’histoire mais qui reste à la surface.

Au départ, il y avait un manga (titré La Maison des Makanai dans son édition française chez Noeve) publié au Japon depuis 2016 et créé par Aiko Koyama. Une plongée dans le monde des geishas contemporaines, au cœur du quartier de Gion à Kyoto, où leur existence se maintient encore après avoir chuté drastiquement partout ailleurs dans le pays.

Pour son retour à la série, onze ans après Going My Home, Hirokazu Kore-eda (cinéaste récompensé à Cannes pour Une affaire de famille en 2018) s’intéresse donc à un monde juste à côté du monde, une petite communauté humaine où de jeunes femmes apprennent ce qui deviendra leur métier : pratiquer les arts, et tenir compagnie à des hommes.

Deux maiko (apprenties geishas) quittent leur famille à l’âge de seize ans pour commencer leur formation et arrivent dans cette ville qu’elles ne connaissaient pas. Elles s’appellent Kiyo (Nana Mori) et Sumire (Natsuki Deguchi), sont les meilleures amies du monde depuis l’enfance, et ont juré de ne jamais se séparer. Sauf que la première, après quelques jours, est jugée inapte à devenir plus tard une geisha. Panique. Par un glissement bienvenu du récit, elle s’impose en tant que cuisinière pour le groupe (makanai), ce qui lui permet de continuer à vivre avec son amie ainsi que les femmes qui l’entourent. Ses plats rendent le yakata (leur pension) plus doux et convivial. À travers elle, la série rend hommage à la cuisine populaire japonaise avec une sincérité évidente, des currys de tomate à une somptueuse omelette au poulet Oyakodon.

De la délicatesse à la fadeur

Kore-eda, qui a réalisé six des neuf épisodes, excelle dans l’art de recueillir paisiblement des gestes, montrant de façon assez subtile comment l’incompétence de Kiyo dans sa formation se transforme en finesse devant les fourneaux. Les mêmes mains et le même corps acquièrent sous nos yeux une compétence (la cuisine) alors qu’ils étaient destinés à autre chose, et c’est d’abord ce que l’on retient de Makanai : dans la cuisine des maiko, de plusieurs façons. Alors que le cliché associé aux geishas, dans l’imaginaire occidental, les situe parfois aux confins de la prostitution, la série cherche d’abord de quoi elles sont capables (non pas au service des hommes, mais pour elles-mêmes). Ici, la sororité n’est pas un projet, mais une réalité qui infuse chaque scène. La famille que se crée les deux héroïnes est d’abord féminine.

Le souci, puisque souci il y a, tient à la relative mollesse de l’ensemble. De la délicatesse à la fadeur, il n’y a qu’un pas, et cette fadeur n’est sans doute pas assez travaillée ou habitée pour emporter le morceau. Makanai : dans la cuisine des maiko se contente souvent de touches impressionnistes qui manquent de profondeur, comme si la relative violence des films de Kore-eda (toujours mêlée à une sensibilité qui touche parfois à la mièvrerie) se diluait dans ce projet qui cherche avant tout la lumière et la légèreté. On n’en sort pas indifférent, mais quelque chose manque pour que les enjeux puissants, à l’œuvre ici, parviennent réellement jusqu’à nous. Si on voulait être méchant, on dirait que l’on attend le livre de recettes avec impatience et qu’il nous aurait suffi. On n’est pas si loin de le penser.

Makanai : dans la cuisine des maiko de Hirokazu Kore-eda avec Nana Mori, Deguchi Natsuki, Aju Makita. Sur Netflix