Des parlementaires critiquent la politique de rénovation du parc immobilier

La rénovation énergétique des bâtiments, qui représentent en France un quart des émissions de gaz à effet de serre (GES), est un enjeu majeur de la transition énergétique. Pourtant, atteindre les objectifs de neutralité carbone prévus par la stratégie nationale bas carbone (SNBC) en 2050 grâce à un parc uniquement doté de diagnostics de performance énergétique (DPE) A ou B est illusoire à moyens constants.

C’est le constat que font les parlementaires d’une mission réalisée pour l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (1). «Les objectifs ambitieux assignés au secteur du bâtiment, à l’instar de l’objectif de neutralité carbone en 2050, continuent de contraster avec la faiblesse des moyens disponibles pour les atteindre», assènent les rédacteurs. Les 4 milliards d’euros consacrés à cette politique motivent la rénovation de seulement 70.000 à 80.000 logements chaque année, là où la SNBC pose un objectif de 27 millions de logements neutres d’ici à 2050. 

Impossible de compter sur le neuf pour le satisfaire sauf à attendre 100 ans, puisque le parc de logements ne se renouvelle que de 1% par an. Les parlementaires proposent trois grands axes d’amélioration de la politique de rénovation de l’ancien. 

Refondre les aides

Le premier concerne logiquement la refonte des dispositifs publics d’aides. Plutôt que de multiplier les dispositifs, les parlementaires prônent un recentrage autour de MaPrimeRénov’. Le dispositif est le mieux identifié du grand public et peut constituer une «marque ombrelle», déclinable selon plusieurs modalités d’application. 

Comme l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) et France Stratégie, les auteurs du rapport rappellent que beaucoup de travaux ne permettent pas de diminuer significativement la consommation d’énergie. «L’efficacité des travaux doit devenir un objectif, à la fois en termes de consommation d’énergie mais aussi d’émissions de CO2», écrivent-ils.

Pour inciter les ménages, l’Office propose de créer un nouveau mécanisme hypothécaire basé sur un système viager. L’Etat financerait les travaux de rénovation en échange d’un viager dont le loyer serait calculé sur la moitié de l’économie effectué, le remboursement au principal s’effectuant lors de la vente ou de la transmission du bien. 

L’organe pousse également pour sortir les dépenses en faveur de la rénovation énergétique des règles européennes de déficit budgétaire. Les banques seraient également mises à contribution en accélérant sur les prêts à taux zéro pour la rénovation. «Les banques doivent prendre conscience que financer ces actions est intéressant pour elles : ces travaux permettent en effet d’accroître la valeur du patrimoine de leurs clients», affirment les élus. 

Renforcer le contrôle

La formation des professionnels – dont le nombre est insuffisant pour faire face à la demande -, l’accompagnement à la rénovation et le contrôle de la qualité des travaux réalisés constituent d’autres pistes d’amélioration. Sur ce dernier point, les parlementaires estiment que le défaut de suivi favorise l’««éco-délinquance» avec des diagnostics ou des travaux bâclés». D’où la nécessité d’une mesure de performance après rénovation ou un suivi des travaux par un expert thermicien et une repression plus sévère en cas de manquement. 

Enfin, l’Office veut impliquer les collectivités territoriales dans la stratégie de rénovation énergétique pour penser la rénovation dans un cadre global (quartier, commune, pâté de maison…) plutôt que bien par bien. Le regroupement pourrait créer des dynamiques collectives pour «inverser le rapport de force dans la relation économique entre clients et prestataires», estime-t-elle. 

(1) «La rénovation énergétique des bâtiments», rapport n°129 de Gérard Longuet et Pierre Henriet, déposé le 17 novembre 2022.