Cibler les diamants russes, une mission presque impossible pour l’UE ?

ALEXANDRE NEMENOV / AFP Yevgeny Tsybukov, directeur adjoint des ventes d’Alrosa Diamond Russia, montre un diamant ovale de 50,21 carats de couleur brun verdâtre au service de taille de diamants d’Alrosa à Moscou, le 3 juillet 2019. Alrosa Russie s’approvisionne en diamants dans des puits de pergélisol et des puits d’explosifs dans le pergélisol de Yakoutie, une région isolée de l’est de la Sibérie qui abrite d’importants gisements de diamants qui assurent la suprématie de la Russie dans la production mondiale. (Photo par Alexandre NEMENOV / AFP)

ALEXANDRE NEMENOV / AFP

Un responsable d’Alrosa présente un diamant de 50 carats à Moscou en juillet 2019.

ECONOMIE – Les Occidentaux s’activent sur plusieurs fronts en cette deuxième quinzaine de mai pour imposer de nouvelles sanctions économiques à la Russie, ciblant notamment ses gisements de diamants, qui constituent la plus grande réserve mondiale. Un secteur qui a ajouté plus de 5 milliards de dollars à l’économie en 2021 grâce à la société Alrosa, qui appartient en partie au Kremlin et qui est également la plus grande société minière au monde.

Alors que Londres a annoncé de nouvelles sanctions contre l’importation d’aluminium, de diamants, de cuivre et de nickel, l’Union européenne entend apporter sa pierre à l’édifice, notamment dans le cadre de la réunion du G7 au Japon. Le président du Conseil européen, Charles Michel, présent à Hiroshima, a assuré ce vendredi 19 mai que l’Union européenne le ferait restreindre le commerce des diamants russes ». “Les diamants russes ne sont pas éternels”il a même plaisanté devant la presse sans en dire plus.

La mauvaise humeur cache ce qui ressemble à un serpent de mer à Bruxelles, que ce soit à la Commission européenne ou au gouvernement fédéral belge. Alors que les Etats-Unis ont imposé des sanctions à Alrosa et à son PDG, les diamants russes du vieux continent échappent jusqu’ici à tout reproche, du fait – en partie – de la réticence de nos voisins d’outre-Quiévrain.

La Belgique a lâché les freins

Avec 1 600 entreprises et une production annuelle de 38 milliards d’euros, la ville d’Anvers en Flandre est la véritable capitale européenne du diamant, rivalisant même avec Dubaï pour le titre mondial. Comme l’a rappelé l’eurodéputée socialiste belge Vicky Reynaert, de tous les diamants du monde, 85 % des diamants bruts, la moitié des diamants polis et 40 % des diamants industriels transitent par Anvers.

L’élu et ses collègues du parlement fédéral belge ont voté fin avril une résolution visant, entre autres, à interdire l’importation de diamants russes. Un changement notable sur vos pieds. Comme l’ont souligné nos confrères Radio Nationale PubliqueSelon Hans Merket, chercheur spécialisé dans le lien entre ressources naturelles et conflits, la Belgique serait le seul pays européen à ressentir des sanctions si l’Union européenne allait dans ce sens.

contacter via Le HuffPostIl estime que Bruxelles n’a plus d’autre choix que de changer de position. “ La Belgique ne voulait pas de sanctions au départ parce qu’il n’y avait pas de coordination internationale et parce que la concurrence avec les Émirats arabes unis, son principal défi, la redoutait. On craignait que sans coordination, le marché ne se déplace vers des marchés parallèles et quitte Anvers. Pourtant, ils ont reconnu que les sanctions américaines avaient un impact similaire. En conséquence, la Belgique a connu une baisse boursière et une mauvaise presse en raison du blocage des sanctions explique Hans Merket.

Des sanctions suffisamment efficaces ?

Reste à savoir de quelles sanctions on parle. Alors que deux responsables du G7 ont abordé la question de la traçabilité à Reuters, « En matière de pierres précieuses, le diable se cache dans les détails. L’idée de traçabilité est fondamentalement positive, mais aujourd’hui elle n’existe pas.Vous souvenez-vous de Hans Merket ? HuffPost.

Après le début de la guerre en Ukraine, le marché du diamant a connu un déclin. Les exportations de l’Inde, où 95 % des diamants russes sont taillés et polis, ont chuté car les entreprises américaines et européennes refusent d’acheter des diamants russes. Du moins sur papier. ” Les entreprises américaines comme Tiffany exigent des certificats, des preuves papier que les diamants qu’elles reçoivent ne proviennent pas de Russie. Cependant, cela ne peut pas être fiable à 100%.Rappelez le spécialiste.

C’étaient des diamants fortement changé“s” ont été exemptés des sanctions de Washington, les diamants de Russie et de travail en Inde, par exemple, se retrouvent sur le marché américain comme certifiés “made in India”.

L’Inde attend

De nos jours, la technologie de tréfilage des diamants taillés existe, mais elle n’est pas adaptée à la taille du secteur. Si on lui donne quelques mois pour se réorganiser, on peut resserrer le filet. Nous ne pouvons pas garantir les petits diamants, mais nous pouvons commencer à dessiner les plus gros diamants, par exemple à partir de 1 carat, mieux. », détaille Hans Merket, qui reste optimiste quant aux sanctions européennes contre les diamants russes, quoique dans un douzième paquet.

Charles Michel, le “refuse de parler pour la Belgique”Néanmoins, il est également convaincu que la Belgique finira par accepter des sanctions similaires.

Quant à l’Inde, qui n’a jamais condamné l’invasion russe, selon le juge expert, elle n’aura d’autre choix que de suivre la voie du G7, qui représente 70 % du marché du diamant. Avec de nombreuses sollicitations des grandes puissances qui voient en lui un allié contre la puissance chinoise, nul doute que Narendra Modi, attendu à Hiroshima ce vendredi, affichera tous ses aspects et apparaîtra comme une perle rare.

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